Céline et la révolution du roman, par Olivier Macaux le 7 novembre 2011
Céline et la révolution du roman par Olivier Macaux, le 7 novembre 2011
Une fois encore, Olivier Macaux a su entraîner plus de 180 membres de l’UTL dans l’univers d’un grand romancier, Louis Ferdinand Céline, un des écrivains les plus traduits et diffusés dans le monde. Le gouvernement a cependant refusé la commémoration du cinquantenaire de sa mort.
Louis Ferdinand Céline (1894-1961), après Marcel Proust, a révolutionné le langage littéraire et la perception du monde moderne, sous le signe de la mémoire et du temps.
C’est sur la guerre 14-18 que Céline a prélevé la déclaration de sa pensée. Ayant vécu le chaos dès ses 20 ans il conteste l’ordre qui a permis cette destruction de l’homme. La foi, la raison et le progrès ont été anéantis dans les charniers. En prime, la crise de 1929 mettra en vedette l’inégalité profonde du système capitaliste.
Pessimiste, athée, nihiliste
Rétif à tout embrigadement, pessimiste, athée, nihiliste et anarchiste, il engage le combat contre la désespérance, face à l’absurdité et au tragique de l’existence. Dans « Voyage au bout de la nuit » en 1932, il dresse un réquisitoire scandaleux contre la civilisation occidentale. Voulant faire entendre toutes les voix dans ce monde complexe, il se joue des conventions littéraires. Il fait entrer l’argot et le langage parlé dans un style très travaillé qui démode le langage académique. Cette manière nouvelle d’écrire les hommes et le monde se consolidera dans « Mort à crédit »en 1936, « Guignol’s band » en 1944, « Casse pipe » en 1949, « Féérie pour une autre fois » en 1952, « Normance » en 1954, « D’un château l’autre » en 1957, « Nord » en 1960 et « Rigodon » publié en 1969 seulement.
Par contre les pamphlets de Céline feront entendre, à partir de 1936, avec « Mea culpa » puis « Bagatelles pour un massacre » en 1937, « L’école des cadavres » en 1938 et « Les beaux draps » en 1941, une voix réactionnaire et raciste, revendiquant le pacifisme absolu face à des juifs accusés de vouloir la guerre contre l’Allemagne.
Louis Ferdinand Destouches
Louis-Ferdinand Destouches a choisi son pseudo en hommage à sa grand’mère. Issu d’un milieu parisien de petits commerçants nationalistes, il transposera sa vie dans son œuvre. Enfant intelligent, doué pour les langues, il refuse le commerce comme avenir et s’engage dans l’armée en 1912. Blessé au bras en octobre 1914, il sera réformé fin 1915. Devenu médecin en 1924, il s’engage dans la Société des Nations et voyage en Afrique, aux Etats-Unis, prenant conscience des injustices sociales. Médecin chef au dispensaire de Clichy en 1931, il publie le « Voyage au bout de la nuit » en 1932. Huit romans analysant les dérives pulsionnelles de la civilisation occidentale se succèderont jusqu’à sa mort.
Antisémite et collaborationniste pendant la seconde guerre mondiale, Céline fuira en Allemagne puis au Danemark, revenant amnistié à Meudon en 1951. Reclus et clochardisé, il devient un écrivain misanthrope.
Persuadé de l’évolution de la société et de la langue dont il rend compte dans ses « Entretiens avec le professeur Y » en 1955 Céline, en perpétuel renouvellement dans cette vision hallucinée de l’homme et de l’histoire, décrit la consommation et la communication comme valeurs dominantes et la faillite de l’individu sujet.