Le théâtre de l’absurde, le vertige du non-sens et du désespoir, le 27 mai 2013
Le théâtre de l’absurde, le vertige du non-sens et du désespoir, le 27 mai 2013
Olivier Macaux, comme à son habitude, avec clarté et enthousiasme, a présenté le 27 mai, cette révolution théâtrale des années 50. Dans ce monde déboussolé d‘après-guerre, les auteurs, s’inspirant des surréalistes s’affrontent au non-sens et au désespoir par l’absurdité des situations et la déstructuration du langage.
L’expression « théâtre de l’absurde » est due au critique anglais Martin Esslin en 1961, malgré le refus d’appartenir à un mouvement de la part d’auteurs individualistes tels, entre autres,Ionesco, Adamov ou Beckett. Toutes les œuvres refusent le théâtre psycho-narratif représenté par Jean Giraudoux ou Jean Anouilh. Elles rejettent les idéologies mais sont dissemblables. Dans « Rhinocéros » Eugène Ionesco dénonce l’absurdité des totalitarismes qui nous transforment en bêtes standardisées. Slawomir Mrozek rejette les lignes de démarcation dans « La maison frontière ». Samuel Beckett nous dit avec humour dans « En attendant Godot » que la misère et la solitude sont inhérentes à la condition de l’homme, veule et ordinaire.
Refusant les pièces à thèse de Sartre et de Camus, ces exilés pour la plupart, venus de Roumanie, d’Irlande, de Pologne ou d’Espagne et dont les familles ont été marquées par les violences montrent le côté invivable de notre monde. Les petites salles de la rive gauche à Paris, entre Sorbonne et Montparnasse, accueillent dans des conditions matérielles très précaires ces œuvres jouées pour des publics d’intellectuels.
Les précurseurs
Depuis Shakespeare, en passant par Alfred de Musset et Feydeau l’absurde a été présent dans le théâtre à travers certains personnages. Alfred Jary avec « Ubu roi » et avant Apollinaire dans le drame surréaliste des« mamelles de Tirésias » et Antonin Artaud mettant en scène la farce tragique de« Victor ou les enfants au pouvoir » de Vitrac, apparaît comme le père désinhibé de l’absurde.
La langue un jouet
Dans le théâtre de l’absurde la langue devient un simple jouet et perd de sa cohérence, la parole fonctionne à vide. Monsieur Smith dans « La cantatrice chauve » déclare tranquillement : « Un médecin consciencieux doit mourir avec le malade s'ils ne peuvent pas guérir ensemble ». Monsieur Martin annonce pompeusement « J’aime mieux pondre un œuf que de voler un bœuf ». Jean Tardieu dans « Les amants du métro » s’attache plus à la musique des dialogues, réduits à leur plus simple expression, qu’au sens. Le Shaga de Marguerite Duras est une pièce uniquement axée sur le langage. Une femme en se réveillant un matin se met à parler une langue qui n’existe pas. Roland Dubillard rassemble en 1975 ses sketches burlesques écrits en 1953 pour la radio en Diablogues pour le théâtre. Les deux personnages se perdent dans la logique du langage.
Humour et pessimisme
Samuel Beckett écrit à cette époque ses pièces les plus connues, « En attendant Godot », « Fin de partie » et « Oh les beaux jours ». Ces vies et ces actes dénués de sens traitent du désespoir dans un monde incompréhensible et donc absurde. Mêlant humour et pessimisme il obtient un grand succès et le prix Nobel de littérature en 1969.
Sans proposer de solutions, les écrivains du théâtre de l’absurde veulent faire rire de leurs angoisses devant le monde moderne.